Cacao : sa filière en crise & le commerce équitable 2/3
Publié le 23 avril 2013 - Dernière mise à jour le 27 octobre 2020
Voici ce qui nous distingue des approches de développement durable des multinationales, lorqu'il s'agit de cacao équitable ou durable.
L’essor des labels responsable chez les multinationales...
Au cours des dernières années, les entreprises multinationales du chocolat, comme Mars, Nestlé, Kraft ou Cadbury, affichent des démarches de développement durable sur certaines barres chocolatées avec le label de commerce équitable Fairtrade-Max Havelaar, mais aussi les labels durables moins exigeants que sont Rain Forest et Utz Kapeh. Ces entreprises réalisent également leurs propres programmes de cacao durable et communiquent fortement à ce sujet vers les consommateurs. Le Plan Cacao de Nestlé ou le programme QPP (Quality Partner Program) de Barry Callebaut, par exemple, sont des projets qui visent la replantation, la rénovation par greffage ou le développement de nouvelles variétés de cacao. Ils sont parfois accompagnés de programmes sociaux : eau potable, centre de santé, écoles rurales.
...répond à leur volonté de sécuriser leur approvisionnement
Ces démarches de développement durable répondent avant tout à la volonté des entreprises d’accroître la qualité du cacao collecté et de sécuriser leur approvisionnement de cacao, dans un contexte où la concurrence entre géants du cacao est chaque jour plus forte.
Les multinationales partagent toutes le même diagnostic : trop de demande, pas assez d’offre de qualité
Un probable accroissement de la demande de cacao avec une plus grande consommation des pays émergent, pourrait conduire demain à un déficit structurel de l’offre de cacao dans les décennies à venir. Si la consommation chinoise passait de 100g/personne/an à 200g/personne/an (7,5 kg/personne/an en Europe), cela ferait 260.000 tonnes de cacao supplémentaire. L’entreprise Barry Callebaut qui commercialise 15% du cacao mondial prévoit qu’à l’horizon 2020 il faudra 1 million de tonnes de cacao en plus des 3,5 millions de tonnes produits aujourd’hui (et à minima 500.000 tonnes).
Le diagnostic : dans dix ans, il faudrait « une Côte d’Ivoire de plus ».
Un impératif : contrôler la qualité
L’intérêt des multinationales concerne aussi la nécessité de retrouver le contrôle de la qualité dans la filière cacao. En Côte d’Ivoire, premier producteur mondial, une libéralisation mal maîtrisée de la filière, aggravée par la crise politique du pays, a conduit à une totale dégradation de la qualité du cacao. A partir de 2005, le réseau de collecteurs totalement déstructuré ne parvient plus à assurer la qualité minimale. Les exportateurs constatent alors une chute sans précédent des FFA, le taux d’acidité que toutes les entreprises mesurent pour déterminer la qualité des fèves, signe d’un mauvais séchage, d’une fermentation défectueuse, d’une réhumidification des fèves qui provoquent des pourritures et des moisissures.
L’engouement des multinationales pour les certifications durables et les partenariats avec des coopératives ont principalement pour but de s’assurer d’un flux de fèves de qualité.
En oubliant à nouveau les producteurs
Les initiatives de cacao durable des entreprises multinationales ne répondent pas aux enjeux de renforcer des organisations de producteurs autonomes. Leurs partenariats avec les coopératives visent à s’octroyer un volume de cacao de qualité, à un prix raisonnable, en contrepartie d’un investissement dans une certification ou un programme de développement agricole. Chaque coopérative s’engage dans une relation commerciale exclusive avec l’une des multinationales présente sur place. Le rôle des coopératives se limite à la collecte d’un cacao de qualité minimum, pour compenser un réseau de collecteurs aujourd’hui dysfonctionnant. Certes, certaines organisations de producteurs parviennent à tirer profit de la situation et sauront progresser vers une autonomie. La limite de ces nouvelles dynamiques de certification durable impulsées par les multinationales est l’absence d’une réelle vision d’empowerment des organisations de producteurs.